LA MER COULEUR DE VIN de Leonardo SCIASCIA

LA MER COULEUR DE VIN de Leonardo SCIASCIA - Traduit par Jacques de PRESSAC - 2015 - Editions DENOEL - 190 pages

Ce qu'en dit l'éditeur

Rebelle à toute forme d’oppression, Leonardo Sciascia n’a cessé de lutter contre les différents pouvoirs.
Dans ce recueil de treize récits écrits entre 1959 et 1972, l’enfant du pays raconte la Sicile et sa «mer couleur de vin». Dénonçant les ravages causés par la mafia et l’avidité des nantis, il met en lumière le poids de la tradition religieuse et livre de la misère du peuple une série de tableaux saisissants.
Sans aucun doute l’une des voix les plus marquantes de la littérature italienne du XX^e siècle.

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Les premiers mots

""Sire dit le ministre Santangelo , en touchant légèrement du doigt l'épaule de Ferdinand, nous sommes arrivés aux grottes"

Le roi se réveilla en gémissant, ouvrit sur le ministre des yeux humides et égarés, passa le dos de la main sur sa bouche d'où coulait un filet de salive.

"Quoi donc ? demanda-t-il"

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Ces treize nouvelles ont été écrites par l'auteur entre 1959 et 1972, mais leur action se déroule du 18ème siècle au siècle dernier. Les époques sont différentes, mais les thèmes, éternels traversent le temps, toujours actuels. Léonardo Sciascia nous parle de la famille, comme dans la première intitulée "Reversibilité" :"Un corps qui en rachète un autre, grâce à la cruelle religion de la famille, dont se nourrit encore aujourd'hui la Sicile : une jeune fille de Grotte qui rachète la liberté d'un homme du bourg voisin, ennemi, de Racalmuto". Il évoque avec ironie l'existence de la Mafia sur l'île, dénonce l'exil forcé des jeunes qui tentent de fuir la pauvreté en acceptant un travail sous-payé à l'étranger, il nous parle du mariage et de l'adultère, de la différence entre les classes sociales, de la politique, de la religion......

L'une de ces nouvelles m'a particulièrement touchée parcequ'elle évoque une cruelle actualité : "Le Long voyage". Des paysans pauvres, désireux de s'exiler aux Etats Unis ont tout vendu : leur maison, leurs animaux, jusqu'à leurs couvertures, ils ont emprunté à leurs familles, aussi pauvres qu'eux, pour réunir l'argent qui leur permettra de payer le passeur. Ils embarquent sur un pauvre rafiot et après de longues journées en mer sont déposés de nuit sur une plage. Ils s'apercevront bien vite qu'il ne sont pas arrivés en Amérique, mais simplement sur une côte sicilienne.......Ironie du sort: dans les années 60, c'étaient les siciliens qui cherchaient à émigrer vers un monde meilleur. Aujourd'hui c'est toute la misère du monde qui échoue non loin de là, sur les côtes de Lampedusa.

Au fil de ces récits, avec beaucoup d'humour,  l'auteur réussit fort bien à nous faire ressentir son amour pour la Sicile, son pays natal et à nous rendre sensibles à la lutte que mène ce peuple pauvre contre le poids des traditions qui l'empêchent d'évoluer.

En bref

Des nouvelles très différentes les unes des autres. Une belle lecture, enrichissante.

Merci beaucoup aux Editions DENOEL