PETITE SOEUR, MON AMOUR de Joyce Carol OATES

1 septembre 2013

PETITE SOEUR, MON AMOUR de Joyce Carol OATES

PETITE SOEUR, MON AMOUR de J.C OATES - Traduction de Claude SEBAN - 2010- Editions FRANCE LOISIRS - 667 pages

Quatrième de couverture

S'emparant d'un fait-divers, un mystère jamais résolu, qui bouleversa l'Amérique - l'assassinat le soir de Noël 1996 de la petite JonBenet Ramsey, six ans et demi, célèbre mini-Miss vedette de concours de beauté -, Joyce Carol Oates reconstruit l'affaire qu'elle n'hésite pas, elle, à dénouer. Une histoire
effarante racontée dix ans après par le frère de la victime. La petite fille s'appelle maintenant Bliss, c'est une championne de patinage sur glace, l'enfant
adoré de ses parents, la coqueluche d'un pays, la soeur aimée et jalousée par son frère, son aîné de trois ans, Skyler. Skyler qui, depuis le meurtre, a vécu dans un univers de drogues, de psys et d'établissements médicalisés. Agé aujourd'hui de dix-neuf ans, il fait de son récit une sorte de thérapie. Ses
souvenirs sont à la fois vivaces et disloqués. Peu à peu émerge le nom du coupable : est-ce le père - homme d'affaires ambitieux, la mère - arriviste
forcenée, un étranger cinglé ou bien... le narrateur lui-même ?

L'Auteure

Née en 1938, écrivain prolifique, Joyce Carol Oates est auteur de romans, de nouvelles et de poèmes. Issue d'un milieu rural et modeste, isolée auprès d'une soeur autiste et d’un père absent, la jeune femme trouve refuge dans la littérature et découvre très jeune les écrits de Faulkner, Dostoïevski ou encore les soeurs Brontë. Tensions sociales, pouvoir, féminité, sexualité sont autant de thèmes que l'auteur aborde et développe avec pessimisme et lucidité. Avec des romans comme 'Eux', 'La Fille du fossoyeur', ou 'Délicieuses pourritures', Oates dépeint un visage sans concession de l'Amérique, celui des années 1960 et 1970 principalement. C'est grâce à un portrait de Marilyn Monroe, 'Blonde', qu'elle connaît son plus grand succès en 2000. Au-delà de l'exploration d'un mythe américain, c'est la question de l'identité que l'écrivain cherche à percer, elle qui entrevoit dans l'icône d'Hollywood le portrait en filigrane de sa propre mère décédée très tôt, une figure également présente dans le roman 'Mère disparue'. Professeur à l'université de Princeton, auteur d’essais sur l’art de l’écriture, Joyce Carol Oates s'impose comme une grande dame de la littérature américaine contemporaine.

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"Moi, je suis l'enfant "survivant" d'une famille américaine tristement célèbre mais, près de dix ans ayant passé, vous ne vous souvenez probablement pas de moi : Skyler.

Un prénom qui en jette, non ? sky = ciel.

Un prénom choisi tout spécialement par mon père qui plaçait de grands espoirs en moi, son fils premier né.

Un prénom qui, de l'avis de mon père Bix Rampike, mettrait son porteur à l'abri du platement ordinaire."

Encore une fois Joyce Carol Oates ne résiste pas à la tentation de de nous faire à nouveau une critique féroce de la société américaine dans ce qu'elle a de plus détestable.

Le point de départ de cette histoire est un fait divers : la disparition et le meurtre sordide d'une célèbre mini miss : Jonbenett Ramsey. On n'a jamais pu savoir qui était le coupable. Cependant l'auteure le précise dès le début : son livre n'est pas une histoire vécue mais un roman, une fiction. Ici, c'est Skyler Rampike, le frère aîné de Bliss, autrefois appelée Edna Louise, la petite championne de patinage qui est le narrateur. Dix ans après la mort de sa soeur, il a dix neuf ans. Dix ans après que son nom soit apparu dans la liste des personnes soupçonnées de l'assassinat de la petite fille, il est incapable de se souvenir ce qui s'est passé ce soir là, incapable même d'être sûr qu'il est innocent. Son récit est comme un exorcisme, une plongée nécessaire dans l'enfer de son enfance et de son adolescence pour essayer de recoller les morceaux de lui-même.

A travers le récit de son enfance et de celle de sa petite soeur, on entre dans l'intimité des familles de la middle-class américaine : parents arrivistes, obsédés par la réussite sociale et l'argent. Et l'auteure nous présente la famille RAMPICKE sous un jour effrayant : enfants poussés à l'extrême, dès leur plus jeune âge, tant dans leurs études que sur le devant de la scène : Skyller sera délaissé, désaimé par ses parents parcequ'il ne réussit ni dans le patinage, ni dans la gymnastique, Bliss et lui seront étudiés, analysés par nombre de spécialistes et diagnostiqués, bourrés d'anti-dépresseurs, d'amphétamines, de relaxants, de tranquillisants, et autres anxyolitiques (comme tous les enfants de leur milieu du reste). Bliss s'applique à patiner le mieux possible parceque dans son esprit d'enfant, l'amour que ses parents lui porteront sera à la hauteur de sa réussite : par contre si elle échoue ils ne l'aimeront plus, comme ils l'ont fait avec Skyller. Bix le père est uniquement préoccupé par sa place dans la société et sa réussite professionnelle, vantard, coureur de jupons (pour ne pas dire qu'il saute sur tout ce qui bouge) perpétuellement absent. La mère : Betsey fustrée par une carrière de patineuse ratée et qui tente de la vivre à travers sa fille, vaniteuse, égocentrique, psychotique.....

Après une telle enfance, marquée en plus par la mort de sa petite soeur, Skyller peut-il s'en sortir ? Il évoque aussi le rôle des médias dans cette affaire quand les journalistes de tous bords se sont jetés sur lui, sur sa famille, comme des chiens sur un os à ronger, il prend même à partie les lecteurs, avides de sensationnel......

C'est un récit très dur, presque hypnotisant, que nous fait là Joyce Carol Oates ; le ton haché qu'emploie Skyler, l'adolescent névrosé, ne l'adoucit pas, au contraire et on a l'impression par moment d'avoir besoin de reprendre son souffle.....mais un livre que j'ai trouvé magnifiquement écrit et qui pour moi a été un véritable coup de coeur.

NOTE 10/10

J'ai lu ce livre dans le cadre du challenge "Un mot des titres" organisé par CALYPSO sur LIVRADDICT.